« Ce n'est pas le bon moment, rappelez-moi dans 2 mois ». « Combien de temps on se donne pour ce rendez-vous ? ». C'est le premier constat de tous les commerciaux : il est toujours question de temps dans la vente. Et rapidement, le tempo devient clé dans la relation commerciale. Cela vaut à la fois pour le rythme mis en place en live pendant la phase de vente et plus globalement tout au long du « cycle de vie » de la relation client.
Les dangers d'un tempo rapide
La grande tentation du commercial est d’imprimer le rythme de la relation (souvent rapide). Ce faisant, il espère contrôler la relation et se positionner comme un interlocuteur de qualité, qui maîtrise son sujet. Ce comportement est à la fois aligné avec une croyance sociétale qu’il faut s’imposer pour réussir et il est aussi typique des profils de personnalité des commerciaux (il s’agit du profil « promoteur » dans la grille de personnalité formalisée par la Process Com®). En imposant un rythme rapide, le commercial espère aussi optimiser son temps disponible, pour pouvoir présenter de manière explicite et exhaustive la valeur ajoutée de son offre avant que son interlocuteur n’ait décroché - ou raccroché s’il s’agit d’un call :)
Cette technique est celle utilisée à merveilles par Léonardo Di Caprio dans le Loup de Wall Street (allez voir ce film si ce n’est pas encore fait !). Et ça fonctionne très bien. En contrôlant le rythme et le contenu de la conversation, le vendeur manipule le prospect qui achète en ayant perdu la conscience de soi ; en clair, il achète parce que quelqu’un qu’il perçoit comme « plus fort » lui dit de le faire.
Outre la dimension (a) ou (im) morale dont je vous laisse juge, cette technique est séduisante car elle se présente comme une « recette » à suivre. La réalité est qu’hormis certains métiers très spécifiques, on ne vend plus en one shot, on bâtit une relation client.
S'adapter au rythme du client
L’objectif n’est donc pas de vendre à tout prix mais de vendre le bon produit au bon prix et à la bonne personne/société. Et pour cela, il s’agit d’être, dès le premier contact, dans une logique d’écoute active et de grande ouverture pour comprendre son client. C’est là tout l’art du commercial : vous allez danser avec votre client au sens où vous allez comprendre son rythme et vous allez vous y adapter pour former un duo.
Parfois il s’agira de « relancer » le rythme quand vous jugerez que la relation s’éteint, parfois de vous laisser guider en offrant par exemple un temps de parole riche à votre interlocuteur ou encore de laisser s’installer un silence; ce sera difficile, voire douloureux cette impression de perdre le contrôle, mais cela constituera sans aucun doute une matière très riche sur laquelle vous pourrez ensuite vous appuyer. Votre interlocuteur vous explique dans le détail en quoi votre offre lui semble inutile ? Intéressant : cela prouve qu’il a déjà longuement réfléchi au sujet. Ne luttez pas contre lui, dansez avec lui : demandez-lui de vous raconter l’échec qu’il a dû rencontrer sur le sujet. Donnez lui la possibilité d’exprimer sa déception ; il exprimera aussi probablement son espoir. Et, en restant en résonance avec son rythme, exprimez vous aussi les espoirs que vous mettez dans la solution que vous vendez. Il vous explique que les temps sont durs et qu’il n’a pas de budget à court terme ? Faîtes preuve d’empathie, écoutez le vraiment, dites lui que vous le comprenez et combien il est crucial pour lui de retrouver tout de suite une dynamique positive. Peut-être que votre service lui apparaîtra alors comme une solution, et non plus comme un risque coûteux sur le chemin de son redressement.
Une fois la relation créée et le prospect devenu client, posez-vous la question de la danse que vous menez avec votre client. Est-ce lui qui vous sollicite et imprime le rythme des rencontres/discussions, est-ce vous qui l’invitez à des points réguliers? Là encore, il n’y a pas de recette miracle : la relation évoluant, l’autonomie du client change (d’une relation symbiotique à une relation partenariale) et son rythme avec.
Votre talent, ce n’est pas d’imposer un rythme « dynamique », c’est de sentir quand laisser votre client s’exprimer (mener la danse), quand faire le miroir (être un bon partenaire de danse) ou quand proposer (en toute légèreté) un nouveau rythme.